lundi 23 février 2009

n°12 - Dossiers ' Géopolitique et stratégies de Pakistan' 21-02 - 1-: 1-1 La vraie raison de la guerre : l'expansion de l'empire étasunien.

 

Sent: Monday, February 23, 2009 9:16 AM
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Subject: n°12 - Dossiers ' Géopolitique et stratégies de Pakistan' 21-02 - 1-: 1-1 La vraie raison de la guerre : l'expansion de l'empire étasunien.


                                              Aujourd'hui, face aux ambitions hégémonique de l'impérialisme, l'information est une arme au service de la paix.

                               Les médias occidentaux dans leur large majorité accepte les versions de l'armée américaine et ferment les oreilles aux autres sources. .  

                                                                      Dénoncer ne suffit plus, il faut expliquer, informer, transmettre! 

                                                                                      Sa diffusion est un acte de résistance.

  



Dossiers 'Géopolitique et stratégie' de PAKISTAN.  
                                                                                                 n° 12-   21-09
                          C.De Broeder & M.Lemaire                                                                             



 "Dossiers de PAKISTAN" est  visible :

a)   sur mes blog : 
b) sur le site de Robert Bibeau :  : http://www.robertbibeau.ca/palestine.html


 Ps : Avant de vous lancer dans la lecture du journal, noter ceci: Taliban- 'Al Qaïda'  &  Ben Laden = concept réducteur inventé par les Usa, pour désigner la résistance . idem pour le mot 'terrorisme' employé par les Usa & ces acolytes


NB : Si vous voulez-me contacter ou obtenir le Journal par mail, une seule adresse : fa032881@skynet.be



Sommaire.. 

1 Analyse -  Géopolitique et stratégie – Réflexion

1-1 La vraie raison de la guerre : l'expansion de l'empire étasunien.

1-2 Les Etats-Unis sont-ils une menace pour l'Europe ?

1-3 John Foster : L'Afghanistan, le Pakistan et la Nouvelle « GUERRE » de l'énergie.

1-4 L'ONU et l'OTAN : Quelle sécurité et pour qui?

2 Courrier des lecteurs & trouvé sur le net & témoignage 

2-1 Peshawar est un autre monde.

2-2 Le camp de Jalozaï grossit, la crise de déplacement s'amplifie au Pakistan.

3 Annexe

3-1 Section 3 : La vraie raison de la guerre : l'expansion de l'empire étasunien.

3-2 Le cimetière des empires.

3-3 Obama, l'armée et la menace de la dictature aux Etats-Unis.



1 Analyse -  Géopolitique et stratégie – Réflexion
Ndlr : La publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage toutes les analyses des auteurs mais doit être vu comme information.

 1-1 La vraie raison de la guerre : l'expansion de l'empire étasunien.
Question 10 : Quels sont les véritables motifs du déclenchement de cette guerre en Afghanistan et, plus généralement, de la « guerre contre le terrorisme » ?

La guerre en Afghanistan visait des objectifs immédiats et des objectifs stratégiques.

objectifs immédiats : renverser un gouvernement hostile aux É.-U. et mettre en place un gouvernement afghan favorable aux intérêts étasuniens dans la région.

Les Talibans refusaient notamment d'octroyer à des intérêts étasuniens – la compagnie UNOCAL, dont le président Hamid Karzai avait déjà été un consultant – la construction du pipeline trans-afghan devant transporter le gaz naturel du Turkménistan vers le Pakistan. 

Selon Michael Meacher, ex-ministre britannique de l'environnement dans le gouvernement Blair de mai 1997 à juin 2003, les États-Unis envisageaient déjà une intervention militaire contre l'Afghanistan avant le 11 septembre 2001 :

La BBC rapportait (le 18 septembre 2001) que Niaz Niak, ancien secrétaire aux Affaires étrangères du Pakistan, s'était fait confier par des hauts responsables du gouvernement étasunien, lors d'une rencontre à Berlin à la mi-juillet 2001, qu'une "intervention militaire contre l'Afghanistan aurait lieu d'ici la mi-octobre ". Jusqu'en juillet 2001, le gouvernement des États-Unis considérait le régime des Talibans comme une source de stabilité en Asie centrale qui permettrait la construction de pipelines, traversant l'Afghanistan et le Pakistan, pour amener le pétrole et le gaz naturel du Turkménistan, de l'Ouzbékistan et du Kazakhstan vers l'Océan indien. Mais, face au refus des Talibans d'accepter les conditions des États-Unis, les représentants étasuniens leur ont dit : 'ou bien vous acceptez notre offre d'un tapis d'or, ou bien nous vous enterrons sous un tapis de bombes' (Inter Press Service, 15 novembre, 2001). [32]

Le 27 décembre 2002, une entente est finalement signée entre Hamid Karzai et des représentants des gouvernements turkmène et pakistanais : un projet de 3,2 milliards de dollars...

objectifs stratégiques :  installer non seulement en Afghanistan, mais dans plusieurs autres pays d'Asie centrale des bases militaires étasuniennes d'où les États-Unis pourront « projeter leur force » dans toute cette région, jadis la chasse gardée de l'URSS et située dans l'arrière-cour de la Chine...  En ce moment, par exemple, alors que le ton de l'administration Bush monte face à l'Iran, l'armée étasunienne peut compter sur des bases militaires de chaque côté de l'Iran...

En ce qui concerne la « guerre contre le terrorisme » plus généralement, nous en comprenons ainsi les grandes lignes [33]:

  • suite à la fin de la guerre froide, les ressources naturelles et les marchés des régions du globe qui étaient auparavant sous le contrôle ou l'influence de l'URSS deviennent maintenant 'ouvertes' à la convoitise des grandes forces économiques du monde : USA, Europe, Japon, Chine, avec la Russie qui cherche quand même à préserver ce qu'elle peut...
  • La compétition sur le strict plan économique est féroce et les États-Unis ne sont pas assurés de l'emporter sur ce terrain. 
  • Par ailleurs, la supériorité étasunienne sur le plan militaire est absolument incontestable et sans rivale; la tentation est ainsi très forte d'aller chercher par la force des armes ce que la seule compétition économique ne leur permettrait pas toujours de gagner.  Le pétrole irakien étant l'exemple majeur de la dernière période.
  • Les idéologues néo-conservateurs du Project for a New American Century ont clairement pressenti le rôle clé de la suprématie militaire étasunienne pour la réalisation de leur 'projet'.  Dans Rebuilding America's Defenses[34], ils ont indiqué que les États-Unis devraient accroître de façon spectaculaire leurs dépenses militaires pour rendre leur avance insurmontable sur ce plan; se placer ainsi dans la position de mener parallèlement plusieurs fronts de guerre majeurs, etc.  Le seul problème :  à défaut d'un nouveau Pearl Harbour, la population étasunienne ne serait jamais prête à accepter un détournement aussi majeur de ressources vers le secteur militaire.  Surviennent alors les attentats du 11 septembre qui constitueront le prétexte idéal pour gonfler les dépenses militaires de façon incroyable pour être en mesure de mener la « guerre sans fin » contre les forces de l'Axe du Mal.
  • Cette guerre bien réelle, dans laquelle nos gouvernement engouffrent de plus en plus de ressources publiques, s'accompagne de tout un train de mesures et de lois, dites sécuritaires ou anti-terroristes, qui portent gravement atteinte aux libertés civiles et remettent en question des principes de justice fondamentale tels la présomption d'innocence, le droit à un procès juste et équitable, l'interdiction de la torture, etc.[35]
  • Elle se mène aussi sur le terrain du langage, créant de nouvelles expressions pour tenter de justifier ses violations flagrantes du droit international, des libertés civiles et des principes de justice fondamentale : 'guerre préventive', 'combattant ennemi', 'islamo-fascisme', etc.  Dans le but de faire oublier à notre population que cette guerre tue et blesse un grand nombre de civils qui ne sont pas partie prenante aux combats, les compte-rendu officiels des opérations militaires ne font état que de « terroristes », d'« insurgés » ou de « Talibans» tués.  En Afghanistan, d'emblée, tout mort est « un Taliban »...

Bref, la « guerre contre le terrorisme » est l'écran de fumée qui sert à camoufler la poussée ultime d'expansion de l'empire étasunien dans le monde, principalement par la force des armes.  La guerre en Afghanistan a été le coup d'envoi officiel de cette « guerre sans fin » et ne devrait certainement pas en être dissociée dans nos analyses.

http://www.aqoci.qc.ca/ceg/index.php?id=51


1-2 Les Etats-Unis sont-ils une menace pour l'Europe ?

L'Alliance atlantique à la recherche de nouvelles missions

Est-ce la perspective du sommet de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN), à Bucarest (Roumanie), du 2 au 4 avril, ou les incertitudes existentielles de l'Europe ?

Les rapports et ouvrages sur le lien transatlantique et la relation avec les Etats-Unis se multiplient. Dans son livre, M. Edouard Balladur (1) prône un nouvel équilibre et même une union entre l'Europe et les Etats-Unis pour gérer la sécurité du monde.

Hardi, l'ancien premier ministre assimile Occident et démocratie.

De leur côté, cinq anciens officiers généraux ayant assumé des fonctions à l'OTAN proposent de revitaliser l'alliance en créant une direction commune Etats-Unis - OTAN - Union européenne.

Leur rapport (2) décalque, non sans scrupules, des concepts de la pensée militaire américaine, tels que l'emploi du nucléaire préemptif (3)… Une importante « boîte à idées » installée à Bruxelles, Security and Defense Agenda (SDA), envisage pour sa part de « revisiter » la relation transatlantique (4).

Tous ces écrits présentent trois points communs : ils analysent le monde extérieur à l'OTAN comme une menace (du moins lorsqu'ils l'évoquent) (5) ; ils naturalisent l'idée d'un Occident uni par des valeurs communes face à une mondialisation perçue comme chaotique ; enfin, ces textes, constatant l'impuissance des armées occidentales à la lumière des interventions en Afghanistan et en Irak, réclament un élargissement des missions de l'OTAN. Seul l'ancien ministre français des affaires étrangères Hubert Védrine prend des distances avec la bonne conscience qui traverse les autres ouvrages (6).

Un sujet, cependant, n'est pas débattu. Il semble tabou.

Les Etats-Unis pourraient-ils constituer un risque grave pour la sécurité internationale dans les vingt prochaines années ?

Loin d'être illégitime, l'interrogation dépasse l'équipe actuellement au pouvoir à Washington, responsable d'une des pires catastrophes géopolitiques des quinze dernières années – l'invasion de l'Irak. Elle devrait au moins susciter un débat parmi les Européens. Le terrorisme islamiste et la prolifération des armes de destruction massive constituent des risques bien réels. Mais en rangeant, par accord tacite, les Etats-Unis au nombre des solutions, on exclut d'emblée une source éventuelle de menace pour la sécurité internationale. La réflexion sur une diplomatie propre à l'Europe s'en trouve amputée. Si le risque de l'unilatéralisme américain ne pèse pas directement sur la France, faut-il pour autant l'ignorer ?

La planète connaît une phase de transition.

A un système d'unilatéralisme militarisé dominé par une unique hyper-puissance succède progressivement un multilatéralisme marqué par l'émergence de nouvelles puissances (Chine et Inde, Union européenne), par l'existence d'autres Etats dotés de l'arme nucléaire (Israël, Pakistan, Corée du Nord ; Iran demain) et par la nécessité de gérer la raréfaction du pétrole et des matières premières. Au-delà des menaces les plus évidentes (prolifération et terrorisme), certains scénarios de guerre probables se dessinent autour des actions militaires unilatérales (comme celle des Etats-Unis en Irak) et des conflits pour le contrôle des ressources rares. Or, dans ces deux cas, Washington pourrait jouer un rôle déstabilisateur en décidant seul.

Mis en place en 1991, l'unilatéralisme américain possède des caractéristiques uniques, qui se sont soudainement amplifiées avec le traumatisme des attentats du 11-Septembre. Le pouvoir de Washington dépasse les limites habituellement associées à la souveraineté classique et s'étend à l'ensemble de la planète. Cet unilatéralisme est celui d'une puissance inégalée à l'échelle du globe, qui justifie son identité par un « particularisme sacralisé » ou un « messianisme démocratique radical ».

Cela signifie d'abord le pouvoir de refuser les règles de sécurité communes. Dès la présidence de M. William Clinton, les autorités américaines sont allées assez loin en la matière : retrait du traité relatif aux missiles antibalistiques (Anti-Ballistic Missile, ABM), interdisant les missiles antimissiles, pour lancer le programme de défense antimissile ; application très « souple » de la convention interdisant les armes biologiques de 1972 (comme l'a montré, en septembre 2001, la crise de l'anthrax produit par un laboratoire relevant du Pentagone et menant des travaux sur la militarisation de cette substance) ; refus des inspections prévues par la convention sur les armes chimiques de 1993 au motif de la protection des secrets industriels –

Washington se retrouvant ainsi avec la Chine et l'Iran pour fragiliser ce traité international.

Glissement stratégique de Washington

A cela s'ajoute le rejet de la convention contre les mines antipersonnel de 1997, aux côtés de la Chine, pour « protéger les troupes américaines de Corée » et le refus de la négociation sur le commerce des armes légères, au motif que le deuxième amendement de la Constitution américaine donne droit aux armes individuelles. Egalement repoussée : la justice collective de la Cour pénale internationale (CPI), pourtant proposée par le président Clinton. Le Congrès alla jusqu'à menacer de couper les subsides aux pays du Sud bénéficiaires d'aides publiques américaines s'ils ne signaient pas un traité bilatéral pour s'interdire d'extrader des citoyens américains poursuivis par la CPI.

L'unilatéralisme, c'est encore le pouvoir de décider qui, à chaque moment, est l'« ennemi » : l'Irak (comme l'a affirmé M. Colin Powell, le 6 février 2003, à l'Organisation des Nations unies [ONU]), l'Iran, Al-Qaida, etc. Ce pouvoir d'énonciation impose à la « communauté internationale » un échéancier, celui de la « guerre globale contre le terrorisme » et contre la prolifération. Le discours de M. George Bush de janvier 2002 dénonçant l'« axe du Mal » en est un exemple. Le président américain passe sans hésitation, et sans cohérence, de la guerre contre le terrorisme islamiste, responsable du 11-Septembre, à la lutte contre la prolifération (ni la Corée du Nord ni l'Iran n'étaient pourtant accusés de rapports troubles avec M. Oussama Ben Laden). En dressant une liste précise de pays dangereux, M. Bush délivrait a contrario des brevets de « proliférateurs acceptables » à Israël, à l'Inde et au Pakistan, reconnaissant ainsi que toutes les proliférations ne sont pas déstabilisantes.

L'unilatéralisme, c'est également le pouvoir d'agir militairement seul : l'effort de défense américain représente la moitié des dépenses mondiales d'armements. La réflexion actuelle sur l'emploi de petites armes nucléaires (« mini-nukes ») et l'affirmation du principe de la guerre préemptive reflètent les grandes composantes de la réflexion stratégique d'un pays qui n'a jamais connu de guerre de destruction totale sur son territoire (7) – mais qui réfléchit placidement aux moyens de la déclencher chez les autres. Enfin, et on le voit avec l'Irak, l'unilatéralisme, c'est le droit que l'on s'accorde de redessiner la carte du globe. En témoigne le projet de « Grand Moyen-Orient ».

Les Etats-Unis sont la dernière démocratie à avoir mené une guerre chimique au cours de la seconde moitié du XXe siècle. Au Vietnam, en larguant, entre 1961 et 1971, quarante millions de litres d'« agent orange », soit trois cent trente-six kilos de dioxine, produit particulièrement toxique que l'Europe a découvert à Seveso (8). Les tribunaux américains ont accepté récemment d'indemniser d'anciens GI victimes de cette arme effroyable, mais ils refusent de reconnaître ce droit aux victimes vietnamiennes.

Les élections américaines peuvent-elles changer la donne ? Trois éléments communs se retrouvent chez les candidats encore en lice, Mme Hillary Clinton, MM. Barack Obama et John McCain.

La vision messianique des Etats-Unis subsistera, les alliés étant plus ou moins consultés. Même M. Obama, candidat le plus sensible aux réactions internationales, n'a mené aucune audition en tant que président de la sous-commission Europe de la commission sénatoriale des relations extérieures. L'individualisme, le moralisme et l'exceptionnalisme qui imprègnent les élites aussi bien que l'opinion publique expliquent le sentiment consensuel que nul n'est en droit de remettre en question la pureté de leurs intentions. Ni la justesse de leurs définitions du Bien et du Mal (9).

Le glissement stratégique de Washington, de la dissuasion – une doctrine de préservation de la paix qui a fonctionné pendant toute la guerre froide – à la préemption, qui est une logique de déclenchement de la guerre, trouve son origine dans l'exceptionnalisme américain. Lequel postule que la sécurité du pays ne doit dépendre de personne et qu'elle pourrait justifier à elle seule une attaque préventive. Le 11-Septembre, qui fut une attaque directe et meurtrière sur le territoire américain, a consolidé ce genre de « postulat ». Seul frein psychologique à cette dérive, la mort de quatre mille GI (qui pèse plus dans le débat électoral que celle des centaines de milliers d'Irakiens).

Seconde constante programmatique des aspirants à la Maison Blanche, la solidarité inconditionnelle avec Israël, qui rend plus aléatoire encore une paix durable au Proche-Orient. Favorables au « Grand Israël », les néo-évangélistes revendiquent le soutien de 30 % de la population américaine ; leur influence redouble le rôle traditionnel de la communauté juive organisée (10). S'agissant du monde musulman, la plupart des discours politiques comportent le terme d'islamo-fascisme, comme si l'islam avait l'exclusivité de la violence et du radicalisme (11). Dans la région, la diplomatie américaine a d'ailleurs adopté la règle du « deux poids, deux mesures ». Conseiller de Mme Clinton, M. Richard Holbrooke a déclaré : « La question centrale en Palestine n'était pas la démocratie mais la paix avec Israël. (…) Dans la région, entre la paix et la démocratie, je choisis la paix sans hésiter (12). »

La remarque semble également s'appliquer à l'Iran. Seul pays de la région dont le président est élu avec 55 % des voix, il est plus démocratique et moins islamiste que l'Arabie saoudite, moins nucléaire que le Pakistan ou Israël. Les déclarations provocatrices de M. Mahmoud Ahmadinejad ne peuvent masquer l'origine de sa quête de l'arme nucléaire. Elle remonte à la guerre avec l'Irak (1980-1988), pays agresseur soutenu jusqu'à l'extrême par les Occidentaux. Le conflit a causé entre huit cent mille et un million de morts iraniens, d'où le rôle aujourd'hui encore des anciens combattants (à travers les pasdarans ou la Fondation des martyrs) ; l'emploi des armes chimiques contre ces soldats n'a jamais été condamné par les Occidentaux. Enfin, le pays est entouré par les forces d'une superpuissance qui s'est donné comme ambition de renverser le régime (les troupes américaines stationnent en Irak, en Afghanistan et dans le golfe Arabo-Persique) et d'un nouveau pays proliférant toléré par Washington, le Pakistan. Dans ces conditions, un responsable politique de Téhéran peut-il croire aux garanties de sécurité données par les Etats-Unis ?

Un militarisme humilié

Dernière caractéristique commune à tous les candidats : une prédilection pour le surdimensionnement de l'outil militaire et pour l'usage de la force. Le budget militaire américain pour l'année 2009 dépasse les 600 milliards de dollars.

Et le soutien de l'opinion publique à l'emploi de la force ne trouve pas d'équivalent dans d'autres démocraties : 82 % contre 44 % en Europe (13).

Quelle que soit leur appartenance politique, les stratèges de Washington n'envisagent pas autre chose qu'une direction américaine de la sécurité du monde. Ce droit moral s'appuie sur le principe de suprématie militaire : supériorité technologique et puissance de feu conduisent l'adversaire à la défaite. Une voie qui montre ses limites en Irak comme en Afghanistan.

On peut d'ailleurs se demander si la suprématie militaire américaine conventionnelle n'est pas un facteur de prolifération nucléaire. Après la victoire militaire de l'OTAN au Kosovo, le chef d'état-major indien déclarait : « On ne se bat pas contre les Etats-Unis sans arme nucléaire. » Symétriquement, la guerre en Irak, les difficultés russes en Tchétchénie comme l'invasion israélienne du Liban en 2006 ont montré l'efficacité restreinte des outils militaires classiques et des stratégies de destruction dans les conflits d'occupation. Néanmoins, au lieu de susciter une réflexion critique, l'impasse en Irak a débouché sur une stratégie du « prompt global strike » qui permettrait une attaque sur n'importe quel point du globe avec des missiles conventionnels en moins d'une heure, version nouvelle de la supériorité aérienne sans risque au sol.

La fabrication de l'ennemi par les « boîtes à idées » et les stratèges demeure une mécanique très efficace.

Dans la « stratégie de sécurité nationale » rédigée pour Mme Clinton par le Center for American Progress (14), la liste des ennemis potentiels est analogue à celle des néo-conservateurs. On y trouve d'abord les rivaux pour le leadership – les peer competitors –, Chine et Russie. Il est intéressant de constater combien le débat sur la sous-évaluation du dollar par rapport à l'euro s'est changé, par la grâce de la dialectique américaine, en un débat sur la sous-évaluation du yuan.

A l'égard de ces puissances, la doctrine adoptée est celle du containment (endiguement), voire du refoulement, comme le montrent les multiples soutiens d'organisations non gouvernementales (ONG) américaines aux pays de la périphérie soviétique (Ukraine, Géorgie…). Mais entre ces puissances nucléaires, le risque de guerre est peu élevé : la dissuasion restera longtemps encore la règle.

Viennent ensuite les pays de l'« axe du Mal », parmi lesquels l'Iran occupe une place à part, et enfin les pays nuisibles, comme la Syrie, le Venezuela ou Cuba. Dans leur cas, l'action unilatérale américaine n'est pas exclue, en particulier pour compenser une éventuelle défaite en Irak. Le choix d'une guerre gagnable contre un ennemi secondaire par un militarisme humilié est toujours possible, comme le fut l'invasion de la Grenade par Ronald Reagan, en 1983, après la révolution iranienne de 1979.

Contre l'Iran, il en va tout autrement. Le risque nucléaire existe car Washington ne supporterait pas une résistance durable.

Lorsque M. Obama a exclu le recours à l'arme nucléaire pour frapper des cibles liées à Al-Qaida ou aux talibans en Afghanistan et au Pakistan, il a immédiatement été critiqué par Mme Clinton, affirmant qu'un président américain ne pouvait écarter l'option nucléaire.

Autre scénario de conflit probable : la guerre pour le contrôle des ressources. Plus que jamais, les Etats-Unis importent nombre de produits de base et de ressources énergétiques. Leur dépendance va croître : 66 % de la consommation de pétrole et 20 % de la consommation de gaz en 2030 contre 47 % et 18 % aujourd'hui  (15). D'autre part, les besoins énergétiques de l'Inde (90 % de sa consommation) et de la Chine (80 %), qui s'approvisionnent surtout au Proche-Orient, sont immenses. Comment Washington gérerait-il un embargo ou une captation de certaines de ces ressources par une puissance régionale (nouvelle Organisation des pays exportateurs de pétrole) ou globale (Chine en Afrique, Russie sur le marché pétrolier et gazier…) ? Par le libre jeu du marché ou par l'action armée ?

L'apparition (prochaine) dans le golfe Arabo-Persique de navires de guerre chinois ou indiens venus, selon la terminologie usuelle, « sécuriser leurs voies d'approvisionnement » sera-t-elle vue par les Etats-Unis comme une ingérence ou comme une contribution à la stabilisation globale ?

Volonté de modifier l'ordre existant

Aucun de ces scénarios n'est certain. Mais la transition vers un système de multilatéralisme ouvre, comme toutes les phases de mutation, une période instable. Les phases de paix durables sont liées à l'équilibre des puissances et non au développement ou au recul de la démocratie dans le monde. Pour assurer la stabilité durant la guerre froide, les pays occidentaux ont soutenu ou installé des dictatures, comme celle des colonels en Grèce ou des militaires en Amérique latine dans les années 1970. En revanche, les phases d'instabilité internationale naissent de l'affirmation de nouvelles puissances et de leur volonté de modifier l'ordre existant : l'Allemagne contestant le diktat de Versailles après 1918, les peuples colonisés refusant l'ordre colonial, le Pakistan et l'Inde cherchant à redessiner le tracé colonial, y compris par la guerre, etc.

Stratégie classique de puissance, la volonté américaine de prévenir l'émergence d'un compétiteur ne constitue pas un projet de sécurité internationale. Jadis, la puissance britannique avait énoncé le « double standard » : il limitait le droit d'un rival à posséder une flotte qui atteigne la moitié du tonnage de celle de Sa Très Gracieuse Majesté. La réflexion stratégique américaine se situe dans une démarche analogue. Il est fascinant d'entendre le secrétaire à la défense Donald Rumsfeld, en Chine, en novembre 2005, expliquer aux autorités locales combien leur effort de défense est préoccupant, alors que celui-ci n'atteindrait, au mieux, que le sixième du budget du Pentagone.

Non moins étonnantes sont les accusations répétées contre les agents iraniens qui déstabiliseraient l'Irak, comme si les quelque cent cinquante mille GI et les cent cinquante mille mercenaires présents sur place avaient contribué à la paix dans la région.

Bien sûr, les Etats-Unis ne sont pas une menace mais un risque ! La France et l'Europe doivent s'interroger sur le projet diplomatique caché derrière l'appel à un rôle renforcé de l'OTAN.

Après l'Afghanistan et surtout l'Irak, quel pays non occidental (au sens où M. Balladur et les cinq officiers généraux définissent la solidarité « occidentale ») percevra les capacités de projection de l'OTAN comme une force destinée à stabiliser une région en crise ?

Où se trouve l'intérêt de l'Europe ? D'abord, dans la construction d'une sécurité internationale multilatérale qui tienne compte des intérêts légitimes de chacun et non pas seulement du droit des « puissances occidentales » à gérer la sécurité de la planète. Les excès de violence et d'illégalité, qu'ils soient étatiques ou non étatiques, sont condamnables dans les mêmes termes. Les morts palestiniens des bombardements israéliens sont aussi inadmissibles que les victimes des attentats terroristes. Si l'antiterrorisme tue plus que le terrorisme, que dénonce-t-on ?

Il en va de même pour l'enlèvement et l'emprisonnement illégaux d'un individu : dans le cas des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), on appelle cela une prise d'otages, dans le cas du centre de détention de Guantánamo, une « détention arbitraire ». Mme Ingrid Betancourt a été enlevée le 23 février 2002. Le Camp Delta de Guantánamo a été créé le 27 février 2002 pour les premiers prisonniers d'Afghanistan, qui ne sont toujours pas jugés…

Pour jouer son rôle, l'Europe devrait se différencier en trois choix essentiels. En premier lieu, son projet diplomatique ne peut être que celui d'une « puissance militaire sans ambition impériale ». Il s'ensuit une modification sensible de son rapport à l'OTAN. L'union des Européens a éclaté à propos de la guerre en Irak. La menace de guerre contre l'Iran présente les mêmes risques.

En deuxième lieu, la stratégie européenne de recours à la force doit se différencier des concepts américains de destruction, et avancer des stratégies de neutralisation. Dans les crises récentes (Yougoslavie, Kosovo, Timor-Leste, Afghanistan…), les Occidentaux ont financé la reconstruction des infrastructures qu'ils avaient détruites. Peut-être vaut-il mieux en démolir le moins possible et éviter de transformer les populations « libérées »en ennemis ?

Enfin, l'Europe pourrait disposer de son propre système d'évaluation des crises et non plus dépendre des renseignements américains. Les mensonges des Etats-Unis et des Britanniques pour justifier la guerre en Irak soulignent l'urgence d'une réflexion sur les moyens européens. Toutes ces propositions accèdent difficilement au débat public ; elles ont pourtant une certaine actualité.

Pierre Conesa.

http://www.monde-diplomatique.fr/2008/04/CONESA/15799


1-3 John Foster : L'Afghanistan, le Pakistan et la Nouvelle « GUERRE » de l'énergie.

Le pipeline Turkménistan-Afghanistan-Pakistan-Inde (TAPI) transportera environ 33 milliards de mètres cubes de gaz naturel par année sur 1 680 kilomètres, du champ gazier de Dauletabad, dans le sud-est du Turkménistan, jusqu'à Fazilka, en Inde, en passant par le sud de l'Afghanistan et le Pakistan. L'Inde et le Pakistan se partageront la production également et verseront un petit pourcentage à l'Afghanistan.

Un accord général concernant le pipeline gazier – signé par les représentants des quatre nations participantes le 25 avril 2008 – engage les partenaires à en entreprendre la construction en 2010 et à fournir du gaz d'ici 2015.

La Banque asiatique de développement (BAsD) finance le projet.

Ce projet de pipeline aurait été prometteur pour le développement économique et la coopération dans la région; mais le conflit en Afghanistan ne cesse d'en retarder la construction.

De plus, les coûts estimés ont doublé depuis 2002, passant à 7,6 milliards de dollars.

Les vues des États-Unis dans la région et les rivalités avec la Russie et la Chine entraînent des manœuvres géopolitiques pour le contrôle de l'énergie, manœuvres dans lesquelles le Canada se trouve impliqué.

Les répercussions du pipeline TAPI sur les Forces canadiennes doivent être évaluées, puisqu'il traversera les grandes zones de conflit de l'Afghanistan, dont la province de Kandahar, où les Forces canadiennes tentent d'assurer la sécurité et de lutter contre les insurgés.

La construction du pipeline pourrait ouvrir d'importantes possibilités de développement économique dans la région; mais si l'on entreprend le projet sans parvenir à un accord de paix mettant fin à la guerre, le pipeline exacerbera la guerre actuelle et obliger les Forces canadiennes à revoir leurs priorités afin de protéger le pipeline.

Le gouvernement canadien devrait suivre la recommandation du rapport final du groupe d'experts de M. Manley et mieux informer les parlementaires et la population concernant le pipeline TAPI et ses répercussions sur les politiques canadiennes.

John Foster

Centre canadien de politiques alternatives

http://www.policyalternatives.ca/documents/National_Office_Pubs/2008/Afghanistan_et_la_nouvelle_guerre_de_lenergie_resume.pdf

 


1-4 L'ONU et l'OTAN : Quelle sécurité et pour qui?

Quelle sécurité et pour qui?

Dans les documents de l'ONU, le monde apparaît sous un jour plaisant. En juin 1945, 51 membres de l'ONU ont paraphé la Charte de celle-ci. Peu d'années plus tard, les deux grands pactes internationaux relatifs l'un aux droits civils et politiques, l'autre aux droits économiques, sociaux et culturels ont été publiés. Immédiatement après, d'importantes conventions concernant la torture, le génocide ainsi que les droits de la femme et de l'enfant ont vu le jour. A la fin de 2008, des Etats membres de l'ONU ont conclu un premier accord sur les bombes à dispersion, garni malheureusement de limitations exigées par de rares Etats membres, dont l'Allemagne.

L'existence d'un droit international d'une ampleur considérable prouve que des gouvernements savent, dans le monde entier, ce qui est important pour la sécurité humaine et doit être protégé.

Depuis 1945, les violations du droit international se répètent à l'envi. Nombre de personnes ne peuvent pas exercer leurs ­droits à l'alimentation, à la santé, à l'habitat, à la culture, au travail et à la liberté d'opinion. Des guerres ont été menées – et continuent à l'être – sans respecter la Charte des Nations Unies, comme le démontrent les cas de la Yougoslavie, de l'Irak et de la Palestine. La torture se multiplie, le génocide a lieu et les traités relatifs à l'armement sont ignorés, l'environnement est privé d'une richesse irremplaçable. Des transactions financières et économiques, ainsi que l'avidité, ont pro­­voqué une crise mondiale sans précédent. Le pragmatisme est à la fête. Les principes sont écartés. L'éthique est devenue un mot ­­étranger. Le mensonge politique s'accroît. Les ciseaux entre riches et pauvres continuent à s'ouvrir. L'inégalité des chances de vivre et de survivre a encore augmenté. Cette évolution résulte dans une forte mesure du ­manque de volonté politique de se dévouer pour la communauté de la majorité et non pour la prospérité de quelques-uns, ainsi que de la distanciation qui en découle par rapport au droit et à la loi. L'ONU a de la peine à exécuter sa mission.

Le XXIe siècle sous le signe du rejet de la double morale

Il n'est donc pas surprenant que le XXIe ­siècle soit, dans le monde entier, sous le signe de la confrontation et du rejet de la double morale. Les alliances occidentales, telle l'OTAN, sont mises au défi par de nouvelles alliances1 aux membres importants, comme la Russie, la Chine et l'Inde. «Nouvelle répartition» est l'expression-clef. Peu avant sa mort en 1964, Dag Hammerskjoeld, le grand homme de l'ONU2, avait dit, soucieux, qu'il fallait trouver, «dans la lutte pour l'honneur, la puissance et les avantages, des chemins permettant de sortir de la jungle humide et broussailleuse.» Après coup, on peut constater, au début de 2009, que deux systèmes – celui du communisme et celui du capitalisme – ont échoué depuis la fondation de l'ONU en 1945. Maximisation du profit aux dépens des autres, malhonnêteté et ethnocentrisme en sont des causes.

L'ONU à la croisée des chemins

Le monde des 192 Etats membres de l'ONU est parvenu à un croisement. Une route conduit dans un monde axé sur le bien-être de la communauté, la réduction des conflits et la paix, c'est-à-dire sur une vie empreinte de dignité, de sécurité humaine et de progrès économique et social pour tous, où que se trouve leur domicile, comme le prévoit la Charte des Nations Unies. L'autre voie est celle du «grand jeu» de la puissance, très prisé au XIXe ­siècle et qui est en passe de devenir l'entreprise la plus complète et la plus périlleuse jamais connue. Sur cette voie, on s'occupe prétendument de démocratie; en fait, de puissance, de contrôle et d'exploitation.

Le dividende de la paix: un mythe

Le dividende de la paix prévu à la fin de la guerre froide n'a jamais été versé. En 2007, les budgets militaires de tous les Etats membres de l'ONU ont atteint le montant record de 1,2 billion de dollars. A lui seul, le budget militaire des Etats-Unis a couvert quelque 40% de cette somme, la part de tous les Etats de l'OTAN atteignant 70%.3 La même année, l'aide totale au développement s'est chiffrée à 103 milliards de dollars4, ou à 8,3% des dépenses militaires!

Depuis 1969, on attend des Nations Unies que les pays industrialisés fournissent une aide au développement au bas montant de 0,7% de leur produit intérieur brut. En fait, ce montant est de 0,3% pour 2008.5 Le déséquilibre extrême entre les dépenses militaires et l'aide au développement démontre que l'on ne met pas l'accent sur la sécurité humaine, au sens des objectifs6 de développement fixés lors de la fête du millénaire de l'ONU, mais sur la sécurité des Etats.

Ceux qui considèrent une telle comparaison comme hors de propos ne veulent pas comprendre que le renforcement de la sécurité personnelle contribue de manière décisive à l'élimination des causes de conflits dans le monde. Ils ne veulent pas admettre que la sécurité militaire accroît et approfondit les causes de conflits lorsqu'ils concluent des alliances et n'agissent que dans l'intérêt propre des Etats.

ONU et OTAN: bien commun ou intérêts de l'Occident

Une comparaison des mandats confiés par l'ONU et par l'OTAN montre clairement le contraste entre ces deux organisations. Durant les 63 années de l'existence des Nations Unies, la mission de l'ONU n'a pas varié. L'ONU a été fondée pour maintenir et stimuler la paix dans le monde. L'OTAN existe pour assurer les intérêts des 26 Etats ­membres. Sa mission, définie par le traité conclu à Washington en 1949, était initialement de défendre les Etats membres. A la fin de la guerre froide, en 1989, cette mission a semblé exécutée. Néanmoins, les membres de l'OTAN entendent maintenir cette alliance de l'Occident. Cela a justifié la recherche d'un nouveau rôle à lui attribuer.

L'OTAN du XXIe siècle est incompatible avec la Charte de l'ONU

En 1999, l'OTAN a confirmé qu'elle entendait se positionner tout différemment, au moyen d'une nouvelle conception stratégique. On voulait passer d'une alliance militaire strictement défensive à une large alliance destinée à protéger les ressources vitales des Etats membres. Outre la défense des frontières des Etats membres, de nouveaux objectifs ont été fixés, tels l'accès aux sources énergétiques, le droit d'intervenir lors de «mouvements d'un grand nombre d'hommes» et lors de conflits très éloignés des Etats membres. La disposition à accueillir d'autres Etats, notamment ceux qui avaient fait partie de l'URSS, traduit bien combien le caractère de cette alliance militaire s'est modifié.

Le traité de Washington de 1949 reconnaissait la Charte des Nations Unies comme cadre juridique impératif de l'OTAN. Or le monopole de l'ONU du recours à la force, tel qu'il figure à l'article 51 de la Charte, est rejeté par la doctrine de l'OTAN de 1999. Les Etats membres de l'OTAN ont étendu au monde entier le secteur d'intervention limité jusqu'alors à l'espace euro-atlantique et ont appliqué à ce secteur une stratégie mondiale d'intervention. A la conférence au sommet que l'OTAN a tenue le 3 avril 2008 à Budapest, elle a déclaré vouloir «relever les défis du XXIe siècle avec tous les moyens que requiert sa mission.» Relevons au passage que le traité de Washington de 1949 avait été adopté par les parlements des Etats participants et ratifié. Il s'agit donc de droit international, contrairement aux stratégies et doctrines formulées ultérieurement par l'OTAN.

Accord ONU-OTAN: de sérieux dangers pour la paix

Malgré ces décisions de l'OTAN qui, visiblement, ne doivent servir les intérêts que d'une petite minorité d'Etats membres de l'ONU, le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, et celui de l'OTAN, Jaap de Hoop-Scheffer, ont signé un accord le 23 septembre 2008. Aucun projet n'avait été déposé au Conseil de sécurité. L'accord, très général pour des raisons évidentes, traite de «consultations élargies» et de «coopération opérationnelle», ­­telles les opérations de «maintien de la paix» dans les Balkans et en Afghanistan. En cas de menace et de défi, les deux Secrétaires généraux s'engagent à agir de concert.

A une époque de confrontation, on attend du Secrétariat de l'ONU une neutralité politique étendue. L'accord ONU-OTAN est tout sauf neutre et ne restera donc pas sans conséquences pour le travail en faveur de la paix. L'ambassadeur de Russie auprès de l'OTAN, à Bruxelles, Dmitry Rogozin, considère l'accord de l'ONU avec l'OTAN, une structure militaro-politique, comme illégal; Serge Lavrov, ancien ambassadeur de Russie à l'ONU, à New York, et actuel ministre des Affaires étrangères est «choqué» qu'un tel accord ait été signé en secret et sans consultations.

L'accord ONU-OTAN incompatible avec la Charte de l'ONU?

Cela pose des questions importantes:
L'accord entre l'OTAN, alliance militaire pourvue d'armes nucléaires, et l'ONU est-il compatible avec l'article 2 de la Charte de l'ONU, qui exige que les conflits ­soient résolus pacifiquement? Peut-on distinguer les interventions de l'ONU et celles de l'OTAN, si trois des cinq membres permanents du Conseil de sécurité sont aussi membres de l'OTAN? Comment les violations du droit commises par l'OTAN pourront-elles être poursuivies désormais par les tribunaux? Une entité telle que l'OTAN, qui a bombardé la Serbie et le Kosovo, en 1999, sans mandat de l'ONU et en contrevenant au droit international public, est-elle un partenaire adéquat des Nations Unies?

La mission de l'ONU rend l'OTAN superflue

Une appréciation de l'accord ONU/OTAN devrait aussi considérer que l'OTAN est une relique de la guerre froide, que l'OTAN, alliance de l'Occident, souffre d'un manque de confiance considérable parmi les 166 autres Etats membres, que c'est un objectif de l'OTAN d'imposer par la force armée ses intérêts énergétiques et de politique de puissance et que les Etats-Unis, membre dirigeant de la communauté de l'OTAN, ont négligé sans cesse l'ONU et ont contrevenu au droit international public de l'ONU de la manière la plus éhontée.7 Finalement, il faut rappeler que la Charte de l'ONU prévoit un «Comité d'état-major chargé de conseiller et d'assister le Conseil de sécurité pour tout ce qui concerne les moyens d'ordre militaire nécessaires au Conseil pour maintenir la paix et la sécurité internationales […].»8 Si, par conséquent, les Etats de l'OTAN se préoccupaient du bien commun et non des intérêts d'un petit groupe d'Etats, un mandat de l'ONU rendrait l'OTAN superflue!

Il est urgent qu'un Etat membre ou plusieurs prient la Cour internationale de Justice d'interpréter l'accord ONU/OTAN du 23 septembre 2008 conformément à son statut.9

L'opinion publique mondiale a le droit de l'exiger et de recevoir une réponse. Rappelons qu'il est écrit dans le préambule de la Charte: «Nous, peuples des Nations Unies, résolus […] à créer les conditions nécessaires au maintien de la justice et du respect des obligations nées des traités […]» et non pas: «Nous, les gouvernements10

Il est ainsi répondu à la question concernant la voie que la communaté internationale de­vrait suivre. Celui qui veut servir la paix et la réduction des conflits doit suivre le chemin multilatéral rocailleux de l'ONU et éviter le chemin aplani de l'OTAN. Comme le disait le ministre canadien des Affaires étrangères Lloyd Axworthy en 1998 au Conseil de sécurité: «Nous devons trouver le chemin du multilatéralisme "qui mène au bien de la communauté internationale et non à la satisfaction de quelques-uns". Cette voie sera longue, car il n'y a pas eu, jusqu'à maintenant, de multilatéralisme désintéressé.»

A partir de 1994, l'ONU a commencé à utiliser la notion de «sécurité humaine». Elle voulait ainsi souligner combien la réalisation des droits de l'homme était importante dans la vie quotidienne des individus et combien elle libérait de la crainte et de la souffrance. Pour la première fois dans l'histoire de l'ONU, des objectifs de développement ont été quantifiés en 2000. Il s'agit là d'un véritable progrès dans le renforcement de la sécurité humaine. Huit objectifs du millénaire de développement dans la lutte contre la pauvreté, la mortalité des enfants et des mères, et pour l'accès à l'école primaire notamment doivent être atteints entre 2000 et 2015.

«Humanisme militaire» – conception masquant le propre intérêt de l'auteur de l'expression

Les Nations Unies veulent ainsi souligner qu'il y a, outre la sécurité axée sur l'Etat (militaire), une sécurité relative à l'homme. Les partisans de la sécurité axée sur l'Etat, tels les gouvernements dont l'objectif est la sécurité militaire, qu'ils veulent réaliser par des alliances du type de l'OTAN, le savent. Ils parlent souvent d'«humanisme militaire» pour légitimer leurs intérêts. Fait partie de cette tentative l'interprétation du nouveau concept de «responsabilité de protéger».11 C'est une duperie: il s'agit de protéger ses propres intérêts et non des innocents de l'extérieur. Dans le cas contraire, la situation serait toute différente en Afghanistan, au Darfour, à Gaza, à Goma, en Somalie et au Zimbabwe. Il y a progrès dans tous les domaines de la sécurité humaine. Néanmoins, il est improbable que les objectifs fixés seront atteints d'ici 2015. Pour la période résiduelle, soit de 2009 à 2015, 135 milliards de dollars sont nécessaires pour atteindre les objectifs de développement, à savoir 22,5 milliards par année. Celui qui affirme que c'est beaucoup d'argent ignore probablement que les Etats-Unis dépensent chaque année 180 milliards de dollars pour leurs troupes en Irak et en Afghanistan ou que les pays frappés par la crise économique et financière ont mis à disposition en peu de semaines quelque 3 billions (!) de dollars en faveur d'institutions abusées et à réformer dans leurs pays.

Les possibilités seraient là – seule la volonté politique fait défaut

Le succès du millénaire de l'ONU pour le développement n'est pas une question d'argent, même en cette période économiquement critique. Des progrès dans la sécurité humaine nécessitent une volonté politique dans la réalisation. Durant les dernières décennies de discussion sur le financemnt de la coopération internationale, il a toujours été souligné qu'il serait facilement possible d'introduire des innovations financières de substitution.12 Les propositions faites à ce sujet ont été ignorées ou repoussées. Maints gouvernements craignent que cela accroisse par trop l'indépendance des organisations internationales, telle l'ONU.

Qui veut vivre en paix au XXIe siècle n'aura aucune difficulté à choisir son chemin. L'accès à ce chemin est ouvert. Le principe de l'ONU selon lequel les épées doivent être fondues en socs de charrues, et non l'inverse, reste le fondement du progrès humain et de la sécurité.     •

Cet article est basé sur une conférence tenue le 6 décembre 2008 à Kassel, lors d'un Congrès pour la paix [Kongress des Deutschen Friedensratschlags, Kassel].
(Traduction Horizons et débats)

1    Font notamment partie de ces nouvelles alliances: a) la Shanghai Corporation Organisation (SCO), que la Chine, le Kazakhstan, le Kirghizstan, la Russie, le Tajikistan et l'Ouzbekistan ont fondée en 2001. Son objectif principal est la sécurité de l'Asie centrale. L'Inde, le Pakistan, l'Iran et la Mongolie font partie de l'organisation à titre d'observateurs. b) Le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine (BRIC) forment une communauté d'intérêts politiques et économiques depuis 2001. c) Le Brésil, l'Inde et l'Afrique du Sud forment une association qui a fait échouer à maintes reprises, en raison de diver­gences sur les tarifs, les négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) dites du cycle de Doha.
2     Dag Hammerskjoeld, est né en 1905 aux environs de Lund (Suède). De 1953 à 1961, il a exercé les fonctions de deuxième Secrétaire général de l'ONU. Il a péri lors d'un mystérieux accident d'avion en Rhodésie, près de la frontière congolaise.
3    Cf. Swedish International Institute for Peace Research (SIPRI), annuaire de 2008, 9 juin 2008.
4    Cf. Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), Aid Targets Slippage out of Reach? DAC 1 Official and Private (Aid) Flows.
5    Conformément à une directive que l'ONU a édictée en 1969, les pays donateurs mettent chaque année 0,7% de leur PNB à la disposition de la coopération et du développement internationaux. Jusqu'à maintenant, seuls le Danemark, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Norvège et la Suède ont atteint cet objectif.
6    En 2000, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté huit objectifs de développement pour la période allant de 2000 à 2015. Parmi ceux-ci, mentionnons la réduction de 50% de la faim et de la pauvreté, l'école primaire pour tous les enfants, l'égalité de l'homme et de la femme, la diminution de 66% de la mortalité infantile et de 75% de la mortalité des femmes en couches.
7    L'invasion de l'Irak en 2003, Guantànamo, Abu Ghraib et les vols vers les lieux de torture sont quelques mots clés à ce sujet.
8    A son article 47, chapitre VII, la Charte institue un Comité d'état-major. Celui-ci, qui se compose des chefs d'état-major des cinq membres permanents du Conseil de sécurité, n'a pas été convoqué depuis 1945. Toutefois, l'article 47 a subsisté.
9    A son chapitre II, article 36, le statut de la Cour internationale de Justice donne à celle-ci la compétence d'interpréter les traités.
10    Voir le préambule de la Charte des Nations Unies
11    Ce concept est mentionné dans le document de l'ONU «2005 World Summit Outcome»
(A/60/L.1 – 15 septembre 2005; § 138 et 139, ainsi que § 79). Dans ce document, l'Assemblée générale relève nettement que seul le Conseil de sécurité a le droit, en vertu du chapitre VII de la Charte, de protéger, même par la force, des populations contre le génocide, les crimes de guerre, les épurations ethniques et les crimes contre l'humanité.
12    Parmi les propositions novatrices de financement, mentionnons l'«impôt Tobin», du nom de l'économiste américain James Tobin. Celui-ci a proposé en 1972 de prélever un impôt (0,05–1,0%) sur les opérations de change internationales. Les fonds ainsi recueillis devraient servir particulièrement à financer l'aide au développement.

Sept défis actuels

En résumé, les défis actuels sont au nombre de sept:
1.    Progrès réalisés dans une réforme fondamentale de l'ONU comme objectif mondial. Le multilatéralisme peut être réalisé dans l'intérêt de l'humanité.
2.    Retour aux principes de la Charte des Nations Unies. L'ONU ne doit pas continuer à servir uniquement d'atelier de réparations politiques.
3.    La reconnaissance et l'encouragement de la sécurité humaine, priorités d'une survie dans la dignité. La sécurité militaire ne peut pas remplacer la sécurité humaine.
4.    Respect du droit international. Il ne saurait y avoir de responsabilité politique sans rendre compte des conséquences de son action.
5.    Refus de l'économie libre (anarchique) de marché. L'ordre, la surveillance et le contrôle de l'économie sont une garantie et non un danger pour la démocratie.
6.    Urgence d'une déclaration de l'ONU contre la double morale. La réduction des droits particuliers d'alliances est une condition à la solution des conflits et sert la paix.
7.    Elaboration de principes d'une éthique de l'information des Etats et des gouvernements, ainsi que de normes relatives aux médias. Poursuites du mensonge organisé.
Finalement, il faut appeler l'opinion publique à continuellement interpeller la politique et à participer plus activement aux affaires de l'époque. Dag Hammerskjoeld parlait de «négociations avec soi-même».

Hans Christof von Sponeck

Hans Christof von Sponeck, ancien suppléant du Secrétaire général de l'ONU

Horizons et Débats, 2 février 2009

http://www.horizons-et-debats.ch/index.php?id=1391



2 Courrier des lecteurs & trouvé sur le net & témoignage 

2-1 Peshawar est un autre monde.

A 400 kilomètres au nord-ouest de Lahore, Peshawar est un autre monde. C'est ici, dans l'une des plus anciennes villes du pays, à l'extrémité orientale de la passe de Khyber, que les résistants talibans et les services secrets des pays de la région ont élu domicile.
On y trouve aussi, depuis quelques mois, une bonne partie des réfugiés qui ont fui la guerre sans spectateur en cours dans les zones tribales du Pakistan.

Ils sont là, rassemblés sous l'abri fragile et précaire des tentes du Haut-Commissariat aux Réfugiés, victimes collatérales de la guerre contre la terreur qui ne cesse de s'étendre depuis l'occupation de l'Afghanistan par les troupes de l'Otan. Les autorités estiment que près de 200 000 personnes ont fui les combats qui font rage dans la région de Bajaur, frontalière du Konar afghan.
Dans les quelques villages qu'ils ont pu reprendre aux talibans, aux Ouzbeks, aux Tadjiks et aux «volontaires» arabes d'Al-Qaida, l'armée pakistanaise a découvert un incroyable entrelacs de galeries souterraines munies de système de ventilation qui expliquent largement la résistance des combattants islamistes à cette opération militaire, la plus importante depuis que les Etats-Unis ont fait du Pakistan leur allié en 2001 dans leur combat contre «la terreur».

Les récits des hommes qui viennent tout juste d'arriver de leur village de Bajaur, lucides et désespérés, expliquent clairement ce qu'a été jusqu'ici le double jeu du Pakistan. Comme celui de Mohamed Zaer, l'imam de la mosquée du village de Charmang : «Les talibans de mon village, il aurait été si facile de les arrêter. Mais jusqu'ici ils étaient soutenus et financés par le gouvernement... et puis les Etats-Unis ont augmenté leurs pressions : tout ce que vous voyez ici, c'est une représentation destinée aux Américains : les tentes de l'ONU et moi nous faisons partie du décor !»
Babar Sharmaz, un paysan de Bakhtiar qui vient d'arriver dans la nuit à Peshawar, a les mains en sang. Avec un groupe de villageois, il a détruit un pont pour couper la route aux talibans : «Nous sommes allés trouver les gardes-frontières pour leur demander de nous aider à nous débarrasser d'eux, mais ils n'ont rien fait !»
Comme la plupart des habitants des zones tribales, Sharmaz juge que les Pachtounes sont victimes d'une conspiration du gouvernement pakistanais : «Lorsqu'il y a un petit attentat à Islamabad contre le Marriott, toutes les télévisions du monde le montrent en boucle, mais personne ne s'intéresse à la mort et à la désolation qui règnent partout dans les zones tribales...» Dans sa maison cossue de Peshawar, le général de brigade Mehmud Shah, qui a été le chef de la sécurité pour les zones tribales jusqu'à ce que des différends l'opposent aux tout-puissants services secrets, reconnaît que la situation dans les zones tribales est sur le point d'atteindre un point de non-retour : «Les Américains doivent comprendre que c'est la souveraineté du Pakistan qui se joue en ce moment.»
Comment les choses en sont-elles arrivées là ? «Jusqu'en 2006, j'ai réussi à contrôler plus ou moins la situation dans les zones tribales en m'appuyant sur les tribus, confie le général. Mais à partir de 2006, le président Musharraf s'est tellement affaibli qu'il a dû donner des gages aux religieux pour obtenir leur soutien électoral et la situation est devenue incontrôlable...» Le brigadier décrit une situation ex-traordinairement complexe où les différentes directions des services secrets et de l'armée passent des marchés de dupes avec les différents groupes extrémistes, sans aucune concertation et souvent dans un simple souci d'avancement. «Pendant ce temps, pour se battre contre nos soldats, les Iraniens arment les chiites; le chef de guerre Rachid Dostom mobilise les Ouzbeks et les Indiens soutiennent d'autres groupes pour nous entraîner dans la guerre civile.»
La pacification des zones tribales est-elle encore possible ? Oui, répond l'officier. A condition que les Américains cessent de bombarder les villages dès qu'ils croient avoir un renseignement : «Depuis le mois d'août 2008, les Américains ont mené plus de vingt bombardements aériens sur les zones tribales et au moins une opération terrestre. Dans la majorité des cas, ils n'ont pas atteint leur cible mais des civils...»
Selon le général Mehmud Shah, le président Zardari n'a pas d'autre choix que de collaborer avec les Américains. La question est aujourd'hui de savoir si sa faiblesse politique n'est pas en train de contraindre le nouveau président, comme son prédécesseur, Pervez Musharraf, à passer quelques accords avec les fondamentalistes, qui le haïssent. Déjà, Zardari a autorisé la reconstruction de la Mosquée rouge, rasée en juillet 2007 parce qu'elle était devenue, au coeur de la capitale, un bastion des combattants du djihad, un centre d'études coraniques dont les étudiants n'hésitaient pas à kidnapper des citoyens au nom de la guerre sainte.
Aujourd'hui, le dôme de la mosquée est blanc, mais le mémorial aux martyrs de la Mosquée rouge, qu'il abrite, et le discours des fidèles, qui sont tous restés en contact avec l'ancien maulana de la mosquée (un ami de Ben Laden), montrent clairement qu'on protège toujours, ici, les talibans et Al-Qaida contre un gouvernement dont on annonce la disparition prochaine.

LE NOUVEL OBSERVATEUR,

Sara Daniel

18-02-2009 

http://www.afghana.org/1015/index.php?option=com_content&task=view&id=392&Itemid=1


2-2 Le camp de Jalozaï grossit, la crise de déplacement s'amplifie au Pakistan.

Plus de 100 familles, soit environ 500 personnes, affluent chaque jour au camp de Jalozaï au Pakistan pour y chercher abri, alors que la pression s'intensifie sur ceux qui étaient déjà des déplacés internes, dans un contexte de combats incessants dans les régions montagneuses au nord du pays.

Quand les combats ont commencé en août dernier dans la région de Bajaur Agency située dans les zones tribales sous administration fédérale, quelque 260 000 personnes se sont d'abord déplacées vers des zones plus sûres dans la Province frontière du Nord-Ouest.

Avec l'escalade du conflit dans le district de Swat, dans la Province frontière du Nord-Ouest et d'autres parties des zones tribales sous administration fédérale ainsi que selon les toutes dernières estimations, le nombre des déplacés s'élève maintenant à 450 000 environ. Ce chiffre inclut des personnes qui sont devenues des sans-abri après les inondations survenues en août. Selon les Nations Unies, le nombre des déplacés pourrait atteindre le chiffre de 600 000 ces prochaines semaines.

Cette région était déjà l'une des plus pauvres au Pakistan, mais l'escalade du conflit et la crise économique générale, qui a vu les prix augmenter de 22 pour cent, met à rude épreuve les ressources des déplacés ainsi que celles des communautés hôtes.

Alors que la plupart des familles fuient vers des zones urbaines, louant des logements ou étant hébergées chez des proches, de plus en plus de civils comme Nauman, un fermier âgé de 56 ans, se déplacent maintenant dans les camps car leurs réserves s'épuisent.

Nauman*, et sa famille comptant 14 personnes, ont fui il y a deux mois leur maison située dans la région de Mohmand Agency, pour échapper au regain de violences entre les forces du gouvernement et les militants. Ils ont trouvé une maison dans la ville de Mardan, mais Nauman n'a plus les moyens de payer le loyer. Par conséquent, il a demandé à contrecœur à être enregistré dans le camp de Jalozaï, où l'agence des Nations Unies pour les réfugiés fournit maintenant une assistance à des déplacés internes pakistanais.

Il ne sait pas combien de temps il devra rester. « Cela dépendra de la situation chez nous », a dit Nauman. « Je ne sais pas si je pourrai trouver du travail ici dans le district de Peshawar avant une amélioration de la situation sécuritaire qui nous permettrait de rentrer chez nous. »

Ali* et sa famille comptant 11 personnes sont eux aussi des déplacés internes. Ils viennent d'être enregistrés au camp de Jalozaï, après avoir été hébergés durant deux mois chez des proches à Mardan. « Nous sommes obligés de vivre ici [à Jalozaï] », a expliqué cet homme de 39 ans originaire de la Mohmand Agency. « Nous ne pouvons plus vivre chez nos proches. Ils sont aussi 11 comme nous, et leur maison n'a qu'une seule pièce. »

Parallèlement, alors que le HCR travaille pour accroître la capacité des camps comme Jalozaï afin de faire face au nouvel influx, l'agence a aussi intensifié sa distribution d'articles humanitaires de base pour aider les personnes vivant en dehors des camps – où résident 80 pour cent des déplacés internes pakistanais enregistrés – dans le cadre d'un effort humanitaire conjoint avec d'autres agences.

Le HCR a déjà aidé plus de 6 000 familles en distribuant des articles comme des nattes de couchage, des couvertures et des batteries de cuisine dans les districts de Mardan, Nowshera, Swabi, Lower Dir, Upper Dir et Kohat.

Zarsanga, qui est originaire du district instable de Swat, était heureuse de recevoir des biens de secours fournis par le HCR. Cette femme âgée de 44 ans et ses sept enfants sont hébergés par une famille vivant à Mardan, depuis qu'ils ont fui leur maison.

Pour les remercier de leur accueil, Zarsanga fait le ménage chez ses hôtes, pendant que son mari se trouve actuellement dans la région pakistanaise des plaines du Punjab à la recherche d'un travail.

« Combien de temps pouvons-nous encore dépendre des autres pour survivre ? » a demandé Zarsanga. « Maintenant que j'ai mes propres biens ménagers, je peux rendre à nos hôtes les ustensiles qu'ils nous avaient prétés. Ils se sont montrés très prévenants à notre égard », a-t-elle ajouté.

Kilian Kleinschmidt, délégué assistant du HCR au Pakistan, a indiqué que, malgré la distribution d'articles humanitaires actuellement en cours, l'agence a reconnu que les personnes avaient besoin de davantage d'aide encore.

« La communauté humanitaire dans son ensemble, en collaboration avec le Gouvernement du Pakistan, a besoin d'accroître l'assistance que nous pouvons fournir, afin que les gens puissent louer des maisons, gagner à nouveau de l'argent et accéder aux services. Ils ont besoin de retrouver leur dignité », a-t-il souligné.

Plus de 64 500 personnes se trouvant dans 12 camps situés dans la Province frontière du Nord-Ouest ont déjà été enregistrées par le Gouvernement du Pakistan, avec l'aide du HCR, soit une augmentation d'environ 15 000 personnes par rapport au mois précédent.

Environ 245 000 personnes vivant par ailleurs en dehors des camps ont été enregistrées. Beaucoup d'autres devraient encore être enregistrées ces prochaines semaines.

L'enregistrement d'une part significative des personnes déplacées est une étape cruciale dans la gestion de cette crise. « L'enregistrement est toujours une tâche complexe, et nous disposons maintenant de meilleures informations, ce qui nous permet de prévoir et de distribuer l'assistance requise », a indiqué Kilian Kleinschmidt.

L'enregistrement des personnes déplacées dans les villes de Karachi, Islamabad/Rawalpindi et Lahore commencera bientôt.

Dans le cadre de l'appel global des Nations Unies aux donateurs, le HCR demande la somme supplémentaire de 16,8 millions de dollars pour intensifier l'aide fournie aux civils pakistanais déracinés.

L'appel global des Nations Unies, publié la semaine dernière, vise à recueillir la somme de 98 millions de dollars.

* Les noms ont été changés pour des raisons de protection

Ariane Rummery et Rabia Ali de l''UNHCR

16 février

http://www.afghana.org/1015/index.php?option=com_content&task=view&id=390&Itemid=41



3 Annexe
Ndlr : La publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage toutes les analyses des auteurs mais doit être vu comme information.

3-1 Section 3 : La vraie raison de la guerre : l'expansion de l'empire étasunien

Question 10 : Quels sont les véritables motifs du déclenchement de cette guerre en Afghanistan et, plus généralement, de la « guerre contre le terrorisme » ?

La guerre en Afghanistan visait des objectifs immédiats et des objectifs stratégiques.

objectifs immédiats : renverser un gouvernement hostile aux É.-U. et mettre en place un gouvernement afghan favorable aux intérêts étasuniens dans la région.

Les Talibans refusaient notamment d'octroyer à des intérêts étasuniens – la compagnie UNOCAL, dont le président Hamid Karzai avait déjà été un consultant – la construction du pipeline trans-afghan devant transporter le gaz naturel du Turkménistan vers le Pakistan. 

Selon Michael Meacher, ex-ministre britannique de l'environnement dans le gouvernement Blair de mai 1997 à juin 2003, les États-Unis envisageaient déjà une intervention militaire contre l'Afghanistan avant le 11 septembre 2001 :

La BBC rapportait (le 18 septembre 2001) que Niaz Niak, ancien secrétaire aux Affaires étrangères du Pakistan, s'était fait confier par des hauts responsables du gouvernement étasunien, lors d'une rencontre à Berlin à la mi-juillet 2001, qu'une "intervention militaire contre l'Afghanistan aurait lieu d'ici la mi-octobre ". Jusqu'en juillet 2001, le gouvernement des États-Unis considérait le régime des Talibans comme une source de stabilité en Asie centrale qui permettrait la construction de pipelines, traversant l'Afghanistan et le Pakistan, pour amener le pétrole et le gaz naturel du Turkménistan, de l'Ouzbékistan et du Kazakhstan vers l'Océan indien. Mais, face au refus des Talibans d'accepter les conditions des États-Unis, les représentants étasuniens leur ont dit : 'ou bien vous acceptez notre offre d'un tapis d'or, ou bien nous vous enterrons sous un tapis de bombes' (Inter Press Service, 15 novembre, 2001). [32]

Le 27 décembre 2002, une entente est finalement signée entre Hamid Karzai et des représentants des gouvernements turkmène et pakistanais : un projet de 3,2 milliards de dollars...

objectifs stratégiques :  installer non seulement en Afghanistan, mais dans plusieurs autres pays d'Asie centrale des bases militaires étasuniennes d'où les États-Unis pourront « projeter leur force » dans toute cette région, jadis la chasse gardée de l'URSS et située dans l'arrière-cour de la Chine...  En ce moment, par exemple, alors que le ton de l'administration Bush monte face à l'Iran, l'armée étasunienne peut compter sur des bases militaires de chaque côté de l'Iran...

En ce qui concerne la « guerre contre le terrorisme » plus généralement, nous en comprenons ainsi les grandes lignes [33]:

  • suite à la fin de la guerre froide, les ressources naturelles et les marchés des régions du globe qui étaient auparavant sous le contrôle ou l'influence de l'URSS deviennent maintenant 'ouvertes' à la convoitise des grandes forces économiques du monde : USA, Europe, Japon, Chine, avec la Russie qui cherche quand même à préserver ce qu'elle peut...
  • La compétition sur le strict plan économique est féroce et les États-Unis ne sont pas assurés de l'emporter sur ce terrain. 
  • Par ailleurs, la supériorité étasunienne sur le plan militaire est absolument incontestable et sans rivale; la tentation est ainsi très forte d'aller chercher par la force des armes ce que la seule compétition économique ne leur permettrait pas toujours de gagner.  Le pétrole irakien étant l'exemple majeur de la dernière période.
  • Les idéologues néo-conservateurs du Project for a New American Century ont clairement pressenti le rôle clé de la suprématie militaire étasunienne pour la réalisation de leur 'projet'.  Dans Rebuilding America's Defenses[34], ils ont indiqué que les États-Unis devraient accroître de façon spectaculaire leurs dépenses militaires pour rendre leur avance insurmontable sur ce plan; se placer ainsi dans la position de mener parallèlement plusieurs fronts de guerre majeurs, etc.  Le seul problème :  à défaut d'un nouveau Pearl Harbour, la population étasunienne ne serait jamais prête à accepter un détournement aussi majeur de ressources vers le secteur militaire.  Surviennent alors les attentats du 11 septembre qui constitueront le prétexte idéal pour gonfler les dépenses militaires de façon incroyable pour être en mesure de mener la « guerre sans fin » contre les forces de l'Axe du Mal.
  • Cette guerre bien réelle, dans laquelle nos gouvernement engouffrent de plus en plus de ressources publiques, s'accompagne de tout un train de mesures et de lois, dites sécuritaires ou anti-terroristes, qui portent gravement atteinte aux libertés civiles et remettent en question des principes de justice fondamentale tels la présomption d'innocence, le droit à un procès juste et équitable, l'interdiction de la torture, etc.[35]
  • Elle se mène aussi sur le terrain du langage, créant de nouvelles expressions pour tenter de justifier ses violations flagrantes du droit international, des libertés civiles et des principes de justice fondamentale : 'guerre préventive', 'combattant ennemi', 'islamo-fascisme', etc.  Dans le but de faire oublier à notre population que cette guerre tue et blesse un grand nombre de civils qui ne sont pas partie prenante aux combats, les compte-rendu officiels des opérations militaires ne font état que de « terroristes », d'« insurgés » ou de « Talibans» tués.  En Afghanistan, d'emblée, tout mort est « un Taliban »...

Bref, la « guerre contre le terrorisme » est l'écran de fumée qui sert à camoufler la poussée ultime d'expansion de l'empire étasunien dans le monde, principalement par la force des armes.  La guerre en Afghanistan a été le coup d'envoi officiel de cette « guerre sans fin » et ne devrait certainement pas en être dissociée dans nos analyses.

http://www.aqoci.qc.ca/ceg/index.php?id=51

 


3-2 Le cimetière des empires.
Ndlr : La publication des articles ou analyse ne signifie nullement que la rédaction partage tout l'analyse de l'auteur mais doit être vu comme information.

 Extrait

Alors que la situation se détériore rapidement sur le terrain, l'aventure sud-asiatique de l'impérialisme américain déraille.
Le nouveau bourbier asiatique des États-Unis
Le New York Times révélait le 4 février que l'acheminement du ravitaillement « destiné aux forces de l'OTAN en Afghanistan a été suspendu mardi après que des militants talibans ont fait exploser un pont dans la passe de Khyber, une zone tribale anarchique du nord-ouest, à cheval sur la frontière pakistano-afghane. »Le pont en fer d'une longueur de 30 verges est situé au Pakistan, à environ 24 kilomètres au nord-ouest de Peshawar, capitale de la Province frontière du Nord-Ouest (NWFP), une métropole florissante de plusieurs millions d'habitants. Environ 80 % du ravitaillement de l'OTAN en Afghanistan transitait par cette importante route.
Selon le Los Angeles Times, les attaques de mardi se sont poursuivies mercredi lorsque des insurgés ont mis le feu à 10 camions d'approvisionnement revenant d'Afghanistan. Les entrepreneurs locaux qui transportent par camion le ravitaillement destiné aux forces de l'OTAN – principalement de la nourriture et du pétrole – sont désormais nombreux à refuser de conduire sur la route difficile de la passe de Khyber en raison des conditions dangereuses.
Comme le rapportait le Asia Times le 29 janvier 2009, Peshawar est la capitale commerciale, économique, politique et culturelle des Pachtounes au Pakistan. Elle se métamorphose de plus en plus en un important centre de pouvoir pour les djihadistes, des deux côtés de la frontière. À l'heure actuelle, pour les talibans et d'autres militants, Peshawar et ses environs ne sont pas seulement l'épicentre du combat qu'ils mènent en Afghanistan et au Pakistan. C'est aussi là qu'ils tentent d'établir la base à partir de laquelle ils feraient la « guerre de la fin des temps » qui s'étendrait jusqu'au cœur de Damas et de la Palestine. (Syed Saleem Shahzad, « On the Militant Trail, Part 1: A battle before a battle, » Asia Times Online, 29 janvier 2009) Les enlèvements – perpétrés par des militants ou des gangs criminels – et les décapitations sont de plus en plus fréquents et la population de Peshawar vit dans la peur. Les résidents croient qu'une « confrontation majeure » entre l'État et les djihadistes « est imminente ».
On pouvait lire dans le Daily Times du 4 février que la « talibanisation » de la zone tribale d'Orakzai, près de Peshawar, s'est accélérée à un point tel que les locaux ont fuit la région afin d'« échapper à une gouvernance de style taliban ». Le quotidien révélait que Orakzai, qui a une frontière commune avec le district de Kurram à l'ouest et celui de Hangu à l'est, fournit un moyen au Tehreek-e-Taliban Pakistan (Mouvement des talibans du Pakistan), qui a été banni, d'étendre son influence à Peshawar par la zone tribale de Khyber. L'organisation a déjà fait savoir qu'elle était dans la région en attaquant un terminus de convois pour le ravitaillement des forces américaines et de l'OTAN en Afghanistan. En dépit des tentatives du gouvernement pour stopper leur infiltration, les talibans ont célébré récemment leur « contrôle total » de la région en y invitant un groupe de journalistes à une démonstration de pouvoir. (Abdul Saboor Kahn, « Orakzai becomes a new have for Taliban », Daily Times, 4 février 2009)
Des officiels pakistanais ont avoué au New York Times qu'« ils ne savaient pas pour l'instant quand les camions pourraient à nouveau emprunter la passe de Khyber pour acheminer de l'approvisionnement crucial aux forces de l'OTAN en Afghanistan ». Entre-temps, les États-Unis ont subi un autre revers concernant leurs plans dans la région. Un article du Guardian révélait le 3 février que le Kirghizstan, ancienne république soviétique d'Asie centrale, menaçait de fermer sa base aérienne américaine de Mana, « un relais clé pour les forces de la coalition qui se battent près de là, en Afghanistan ».Les commandants des États-Unis et de l'OTAN ont tous deux exprimé leur désarroi face à la fermeture potentielle de la base. Elle survient au moment où l'OTAN tente désespérément de développer son réseau routier d'approvisionnement en passant par les pays du nord de l'Asie centrale à la suite d'une série d'attaques dévastatrices de convois de camions provenant du Pakistan.
(Luke Harding, « Closure of US base in Kyrgyzstan could alter Afghanistan strategy », The Guardian, 3 février 2009)
....
Si les choses vont comme le désire le gouvernement américain, la paix n'est pas pour bientôt. Le secrétaire à la guerre, Robert Gates, un rescapé de M. Bush, disait au Congrès la semaine dernière que la guerre serait un « long travail » au dénouement incertain. Mais si l'histoire est gage d'avenir, la fin n'augure pas bien pour l'impérialisme – ou les populations d'Asie du Sud.
Alors que des officiels de haut rang du gouvernement Obama et des bureaucrates du Pentagone s'en remettent au gouvernement du président Asif Ali Zadari pour stabiliser la situation du côté de la frontière pakistanaise, les reportages indiquent que l'ISI continue de financer et de conseiller des armées par procuration.
Le Los Angeles Times révélait le 3 février que des officiels afghans de la sécurité avaient démantelé une cellule de kamikaze dans la capitale, Kaboul, et que les 17 hommes arrêtés étaient prétendument « affiliés à un groupe de militants situé au Pakistan connu sous le nom de réseau Haqqani et que le chef de cette cellule était de nationalité pakistanaise ».
Même si, selon le L.A. Times, les relations entre l'Afghanistan et le Pakistan se sont « considérablement améliorées » depuis que M. Zadari a pris les rênes du régime méprisé de M. Musharraf, la politique de l'ISI contre son rival géopolitique, l'Inde, n'a pas changé malgré les milliards de dollars d'assistance en « contre-terrorisme » et de soutien armé des Étatsuniens : l'ISI cherche une « profondeur stratégique » en contrôlant un État client afghan conciliant.Les liens de longue date entre l'agence d'espionnage et le réseau Haqqani, mené par le commandant vétéran taliban Jalaluddin Haqqani et son fils Sirajuddin, ont fait la une l'an dernier lorsque le renseignement américain a confirmé l'affirmation des autorités afghanes voulant que l'ISI ait aidé le groupe à bombarder l'ambassade indienne à Kaboul en juillet. Cette attaque a tué près de 60 personnes. (M. Karim Faiez and Laura King, « Suicide Bombing Ring Is Brought Down in Afghanistan, Officials Say », Los Angeles Times, 3 février 2009)

Tom Burghardt

17.2.09

Tom Burghardt est un collaborateur régulier de Mondialisation.ca. Articles de Tom Burghardt publiés par Mondialisation.ca

Article original en anglais : America's New Asian Quagmire, Graveyard of Empires, le 7 février 2009.
Traduction : Julie Lévesque pour Mondialisation.ca.

http://basta.20six.fr/basta/art/163612491/Le-cimeti-re-des-empires

Antifascist-Calling.blogspot

http://basta.20six.fr/basta/art/163612491/


3-3 Obama, l'armée et la menace de la dictature aux Etats-Unis.
En choisissant l'amiral Dennis Blair en tant que directeur du renseignement américain, le président désigné Barack Obama a intégré à son cabinet trois officiers à quatre étoiles qui sont à la retraite depuis peu. Cette représentation sans précédent du corps des officiers au sein de la prochaine administration démocrate est une indication de la croissance du pouvoir politique de l'armée américaine qui menace sérieusement les droits démocratiques fondamentaux.
Commandant en chef de l'armée des Etats-Unis dans le Pacifique en 1999-2000, Blair s'est distingué par ses tentatives de rapprochement entre le Pentagone et l'armée de l'Indonésie au moment où cette dernière procédait à une véritable boucherie au Timor-Oriental. Cela a eu pour effet de contrecarrer complètement les inquiétudes tièdes qu'avait exprimées l'administration Clinton quant aux droits humains dans cette région du monde.
Avant de faire appel à Blair, Obama avait nommé l'ancien général de la marine, James Jones, au poste de conseiller à la Sécurité nationale et l'ancien chef d'état-major de l'armée, le général Erik Shinseki, au poste de secrétaire aux Anciens combattants. On rapporte aussi que la prochaine administration pourrait demander au général à la retraite de l'Air Force, Michael Hayden, de demeurer au poste de directeur de la CIA.
Le
Washington Post avait décrit samedi dernier cette concentration d'anciens hauts officiers dans l'administration comme une « tendance inhabituelle pour une administration démocrate, une tendance qui a surpris les deux camps politiques ».
Ces nominations ont été précédées par l'annonce que Robert Gates, le secrétaire à la Défense de l'administration Bush, allait demeurer à son poste au Pentagone, où de nombreuses « équipes de transition » sont à l'œuvre pour s'assurer que les guerres d'agression des Etats-Unis se poursuivent et que l'immense pouvoir de l'armée demeure illimité.
Plus tôt ce mois-ci Obama avait explicitement décrit sa soumission au Pentagone en déclarant, « Pour s'assurer la prospérité au pays et la paix à l'étranger, nous croyons tous qu'il faille maintenir l'armée la plus puissante de la planète. » A cette fin, il s'est engagé à augmenter les effectifs des forces terrestres américaines de 100 000 soldats et marines et a clairement fait savoir qu'il n'y aurait pas de coupures importantes au budget militaire. Ce dernier engouffre environ 850 milliards $ annuellement, dans des conditions d'énormes déficits et de crise financière qui s'intensifie.
Un élément de calcul politique se retrouve sans aucun doute dans la décision d'Obama de s'entourer de l'état-major de l'armée et de s'assurer qu'il soit perçu comme « soutenant nos troupes ». Il y a en effet l'amère expérience de la précédente administration démocrate. Le premier mandat de Bill Clinton était venu près d'être anéanti par sa confrontation avec l'état-major sur sa proposition de retirer l'interdiction d'accès des homosexuels dans l'armée. Clinton fut traité avec mépris par la majorité du corps d'officiers durant le reste de son mandat présidentiel.
Le risque d'une confrontation encore plus acerbe sous Obama est bien réel étant donné les conséquences désastreuses des guerres en Irak et en Afghanistan sur l'armée. On rapporte aussi le développement de l'illusion au sein du corps d'officiers que les échecs des opérations militaires américaines dans ces pays sont le résultat d'une « traîtrise » de la part des autorités civiles, des médias et de la population américaine elle-même.
Mais un processus encore plus fondamental sous-tend l'expérience Clinton et la prosternation d'Obama devant l'armée aujourd'hui : l'immense développement du pouvoir du « complexe militaro-industriel » contre lequel avait mis en garde le président Dwight Eisenhower près d'un demi-siècle plus tôt. Ce pouvoir a crû sans interruption durant toute la Guerre froide.
Au cours des sept dernières années de la soi-disant « guerre mondiale contre le terrorisme », le développement de ce pouvoir, parallèlement à l'augmentation du financement de l'armée, s'est accéléré, accompagné d'éléments de plus en plus sinistres liés à l'impérialisme américain et à son recours accru au militarisme pour contrer le déclin de sa position économique mondiale.
Les chefs militaires des commandements régionaux du Pentagone (CENTCOM, PACOM, SOUTHCOM et le nouvel AFRICOM) ont pour la plupart supplanté les ambassadeurs et les officiels civils en tant que représentants des intérêts et du pouvoir américains à travers le monde.
En menant deux guerres en Irak et en Afghanistan, le commandement militaire a maintenant la tâche de diriger des administrations néocoloniales, obtenant ainsi un pouvoir pratiquement illimité sur des populations entière.
Et de plus, avec la création de tribunaux et prisons militaires, comme à Guantanamo, l'armée a usurpé des tâches qui ont été historiquement dévolues aux tribunaux civils fonctionnant sous les règles de la Constitution des Etats-Unis.
Ces changements capitaux ont pris place alors même que l'armée, et surtout son corps d'officiers, est devenue de plus en plus séparée et isolée du monde civil et dominée par la politique républicaine et les croyances de l'évangélisme chrétien. Etant une armée de « professionnels » qui sont « volontaires », elle est davantage isolée des pressions populaires que ne l'étaient les armées de conscrits et de « citoyens soldats » des générations antérieures.
Le Washington Post a publié dimanche un commentaire exceptionnellement direct d'un ancien assistant à la secrétaire d'Etat dans l'administration Bush, Thomas Schweich, sur la domination croissante de l'appareil militaire sur l'Etat américain.
« Notre Constitution est en danger », a écrit Schweich. Il a averti que la nomination d'un nombre sans précédent d'anciens hauts officiers dans le cabinet Obama pourrait venir « compléter le coup d'Etat militaire silencieux qui fait des avancés constantes à l'insu de la majorité des Américain et des médias ». Schweich, ancien diplomate pour la lutte contre le trafic de drogue en Afghanistan qui a œuvré au service des stupéfiants du département d'Etat, a écrit qu'il a « lui-même été témoin de la prise de pouvoir militaire de facto aux dépens du gouvernement américain », qui, en Irak et en Afghanistan, « était, en théorie, justifiée par les exigences de la guerre », a-t-il affirmé.
Il a insisté que ce qui a commencé à l'étranger allait se produire au pays. « Le Pentagone a élaboré des plans pour déployer 20 000 soldats américains à l'intérieur de nos frontières d'ici 2011, officiellement pour aider les responsables régionaux et d'Etat à réagir aux attaques terroristes ou à d'autres catastrophes. » Cette mission, a-t-il indiqué, « pourrait facilement passer de travail de contre-terrorisme d'urgence à du contrôle frontalier, du travail de renseignement ou des opérations policières ».
Un article paru le mois dernier dans un magazine publié par le US Army War College, quelques semaines seulement après l'élection, indique que le Pentagone prépare sa propre « transition », un processus motivé non pas par les vagues promesses de « changement » d'Obama mais par ce que le commandement militaire perçoit comme une crise historique de l'ordre actuel qui pourrait nécessiter l'emploi de la force armée pour étouffer les luttes sociales aux pays.
Intitulé, « Known Unknowns: Unconventional 'Strategic Shocks' in Defense Strategy Development » (Ce que l'on sait des inconnues: Les "chocs stratégiques" non-conventionnels dans le développement de la stratégie de défense), la monographie a été produite par Nathan Freier, un lieutenant-colonel de l'armée à la retraite depuis peu qui est professeur au US Army War College, la principale institution de formation de l'armée pour les futurs officiers. Selon le magazine, il « continue de conseiller, en tant qu'expert, les rôles clé des communautés de politiques et d'analyse à la sécurité et à la défense. »
Freier insiste que l'un des principaux imprévus auxquels doit se préparer l'armée des Etats-Unis est un « violent bouleversement stratégique à l'intérieur des Etats-Unis », qui pourrait être provoqué par un « effondrement économique inattendu » ou le « disfonctionnement de l'ordre politique et légal ».
Il écrit : « Dans la mesure où des événements de ce type impliquent une violence organisée contre les autorités locales, étatiques et nationale, et que ces dernières n'ont pas la capacité de rétablir l'ordre public et de protéger les populations vulnérables, le DD [département de la Défense] serait appeler à combler les lacunes. »
Freier poursuit : « Une violence civile généralisée à l'intérieur des Etats-Unis forcerait l'establishment de la défense à réorienter ses priorités in extremis pour défendre l'ordre fondamental au pays… Un gouvernement américain et un establishment de la défense endormis par une longue période de sécurité au pays seraient forcés de renier certains ou la plupart de leurs engagements de sécurité externes afin de réagir à l'insécurité humaine croissant rapidement au pays. »
Autrement dit, une intensification marquée de l'actuelle crise capitaliste accompagnée d'une éruption de lutte de classe et la menace de révolution sociale aux Etats-Unis pourraient forcer le Pentagone à rappeler ses armées de l'Irak et de l'Afghanistan pour les utiliser contre les travailleurs américains.
Dans de telles conditions, il ajoute : « Le DD pourrait se voir forcé par les circonstances de placer ses importantes ressources à la disposition des autorités civiles pour maintenir et contrer les menaces violentes à la tranquillité domestique. Dans les circonstances les plus extrêmes, cela pourrait signifier l'emploi de la force militaire contre des groupes hostiles à l'intérieur des Etats-Unis. De plus, le DD deviendrait, par nécessité, le centre essentiel pour la continuité de l'autorité politique dans le contexte d'un conflit civil dans plusieurs Etats ou à l'échelle nationale.
Cette formulation étrange : « le centre essentiel pour la continuité de l'autorité politique », est un euphémisme pour dictature militaire.
Il termine cette section de l'article en notant que, « le DD est déjà mis à l'épreuve par les efforts de stabilisation à l'étranger. Imaginez ce qu'impliquerait la même chose mais à beaucoup plus grande échelle au pays ».
Le message est clair. Ayant échoué à étouffer la résistance et rétablir l'ordre en Irak et en Afghanistan, quelles seraient les chances de l'armée de réussir une occupation des Etats-Unis mêmes.
Le fait que ces questions soient posées par les stratèges du Pentagone doit être pris très au sérieux. Ceux qui commandent les forces armées de l'Etat capitaliste américain anticipent que la crise actuelle va créer les conditions pour la révolution et se préparent en conséquence.

Mardi 30 Décembre 2008

http://www.alterinfo.net/Obama,-l-armee-et-la-menace-de-la-dictature-aux-Etats-Unis_a27753.html

http://www.wsws.org



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